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Commentary
Le Monde Online

Le premier “State of the Union” du Président Obama

From the January 29, 2010 Le Monde "Vue de Washington" blog

Le premier “State of the Union” du Président Obama a laissé les Américains responsables sur leur faim et dubitatifs face à l’homme qui leur avait inspiré tant d’espoirs il y a de cela 1 an. Oui, le premier grand oral de Barack Obama m’a deçu. L’Obama 2.0 salué par Slate[1] ne semble plus que l’ombre de lui-meme. Désormais obsédé par son Plan de Relance économique qui n’a guère amélioré la situation (et qui va meme s’empirant au regard des derniers chiffres du marché de l’immobilier), omnubilé par la réforme du système de santé, pourtant massivement rejetté par la majorité des citoyens, Barack Obama semble etre emprisonné dans la cage dorée de la Maison-Blanche. L’accent qu’il a encore récemment mis sur la nécessité d’une “législation sur l’énergie et le climat », alors que sa propre majorité ne le suit plus d’une manière aveugle (notamment les Blue Dogs, des Démocrates soucieux de préserver la compétitivité et la rigueur budgétaire), semble souligner la véritable déconnexion du Bureau Ovale aux arcanes de la politique. Si la “Health Care Reform” voit ses chances d’aboutir déjà très faibles avec la victoire républicaine dans le Massachussets, une telle proposition qui reviendrait à excercer une sur-réglementation de l’économie, de surcroit alors qu’elle subit les affres d’une crise sans précédent et que la reprise est trop timide, me semble très inquiétant.[2]

Laissons de cote ces soucis économiques et attardons nous sur le fait, combien important, de la faiblesse, voire l’inexistence, des annonces faites sur le plan de la politique internationale des Etats-Unis. Sur le site officiel de la Maison-Blanche où figure une synthèse des principaux points abordés par le Président Obama, les questions internationales, au nombre de 3, figurent à l’extreme fin d’une très longue liste hétéroclite.

Si le State of the Union est certes avant tout un discours concentré sur les enjeux nationaux et destinés à une audience américaine, la chose avait toutefois évolué depuis les attaques du 11/09 à la suite desquels les enjeux de la sécurité nationale sont parvenus au premier plan. Désavoué par toutes les élections-tests depuis son triomphe en novembre dernier, le bureau ovale a bien compris l’absolue nécessité de se reconcentrer sur les enjeux qui touchent l’ensemble des Américains : l’emploi, l’écroulement du marché immobilier, le surendettement : une logique électoraliste. Fut-ce au prix de le payer en menant une politique étrangère incohérente? Je cite le Président « “Since the day I took office, we have renewed our focus on the terrorists who threaten our nation, Depuis ma prise de fonction, j’ai mis un accent particulier sur la lutte envers les terroristes qui menancent notre pays.” : l’attentat manqué de Noel 2008 a pourtant révélé une absence totale de coordination des informations sensibles entre nos agences de renseignements, comme en 2001 aboutissement au drame qui nous hante depuis une décennie.

Ce qui a été le plus décevant sur cet aspect a particulièrement été le vrai manque d’accent sur la situation iranienne, à peine traité par le Président au milieu d’un inventaire à la Prévert sur la politique internationale y mélangeant Afghanistan, Irak, mesures anti-terroristes et stratégies d’exportations pour relancer les industries américaines.

J’ai justement eu l’occasion d’assister à une réunion d’experts stratégiques , à la fois démocrates et républicains, réunis par le “Bipartisan Policy Center” très récemment. Un des grands sujets de discussion était que le Président Obama en personne aurait promis aux diplomates français et israéliens qu’il respecterait la date-limite du 1 janvier 2010 avant de faire un point sur les négociations avec l’Iran. Si les discussions n’aboutissaient pas vers une vraie résolution de la crise, des sanctions punitives seraient alors mises en place en concertation avec les alliés des Etats-Unis. Toutefois, hier soir, plutôt que d’aborder des mesures claires en direction de l’Iran, le Président a évoqué des « conséquences ». Laissant peut-etre entendre qu’il comptait poursuivre sa politique vis à vis de Téhéran de main tendue…dans le vide.

La politique du Président a l’égard de l’Iran est désormais clairement perçue comme un échec. Le Time Magazine, pilier des idées reçues, a publié un article cette semaine qui nous éclaire sur l’échec de l’Administration vis à vis de l’Iran.[3] L’incapacité et l’irrésolution du Président de ne pas soutenir le sursaut démocratique du peuple iranien a été une véritable douche-froide pour les partisans d’une politique basée sur les Droits de l’Homme et le respect des Libertés Fondamentales. L’incompréhension du Président de ne pas saisir la véritable nature du régime iranien et s’obstiner à un dialogue face à un sourd devient une réelle menace pour une résolution pacifique de cette crise car la solution actuelle favorise la fuite en avant de Téhéran qui gagne ce qu’elle recherche : du temps. Du temps pour développer son programme nucléaire.

Et c’est justement la semaine dernière que l’ un des plus écoutés spécialistes de politque étrangère américains, Richard Haas, Président du Council on Foreign Relations (qui publie Forein Affairs) a dénoncé la politique iranienne d’Obama, en condamnant la faillite totale des négociations et faisant appel à renverser le régime par le soutien au mouvement démocratique pour empecher une crise nucléaire avec l’Iran, mais avec la bombe cette fois-ci.[4] Hier, c’était Robert Kagan, un des chefs de file des néoconservateurs, a demandé au Président de complètement revisiter sa politique à l’égard de l’Iran toujours par le biais de l’aide aux forces démocratiques, présente dans le pays.[5]

Le temps presse. Je l’avais déjà dit le 16 octobre, le temps est compté. Et cette fois encore plus qu’avant. Car Israël, dit-on, ne veut pas plus attendre. Attendre que le programme nucléaire iranien construise des ogives nucléaires qui menacerait directement son territoire.


Il est donc désormais temps que le Président change de politique à l’égard de l’Iran à travers des sanctions fortes et une aide soutenue aux mouvements démocratiques présents sur place. ________[1]

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